Le loup qui montre patte blanche rentrera dans la bergerie... [PV LIBRE]

J'étais là, allongée à même le sol. Au dessus de moi, le ciel grondait tandis que les gros nuages noirs annonceurs d'un violent orages continuaient à assombrir encore et encore cette journée déjà maussade. C'est drôle, je n'aurais jamais penser me retrouver un jour dans un internat, après tout, je ne suis pas une adolescente à problème et mes parents ont bien assez d'argent pour me mettre dans un établissement bien mieux que celui-ci. Mais mon père, ce menteur, ne peut rien refuser à son petit louveteau adoré n'est-il point? Je n'ai qu'à demander et j'obtiens. Plutôt chouette comme concept.
C'est moi et moi seule qui ai choisi de venir étudier ici. Je me suis bien renseignée avant, j'ai posé des questions, j'ai déjoué tous les mensonges. Je triompherai de tous les possesseurs de journaux et deviendrai Dieu, quoi que cela m'en coûte. Oh je ne suis pas folle, je ne cherche pas à faire ça pour le fun ou bien pour passer le temps. Moi, ce que je veux c'est un monde nouveau, où tout le monde mentira et de ces mensonges naîtra un bonheur jamais connu auparavant. N'est-ce pas génial?

Je m'étirai longuement, toujours allongée. Le sol n'était pas ce qu'il y avait de plus confortable au monde mais au moins je pouvais réfléchir sans être dérangée. Cela faisait à peine une journée que j'étais arrivée ici et j'avais déjà repéré des "Diary holders". Décidant de jouer profil bas pour le moment, je ne leur avait pas encore parlé. Je comptais attendre encore un peu, histoire de les observer gentiment et de découvrir au plus vite la nature de leur journal. Car, dès les premières secondes où je leur adresserai la parole, toutes les cachotteries qu'ils compteraient me faire s'inscriraient immédiatement sur mon journal adoré. Mais j'aurais déjà une longueur d'avance sur eux...
Je me relevai rapidement tout en continuant l'observation du ciel. Si ça continuait comme ça, il allait pleuvoir dans à peine quelques minutes. une demi-heure, tout au plus. J'étais un peu fatiguée, ou plutôt j'avais la sensation de l'être. En fait, la cause de cet état était l'ennui. Il fallait que je me dépêche de récolter des informations et ensuite je pourrai enfin commencer à me faire des amis. Enfin, si on peut appeler "amis" des gens que l'on va forcément devoir tuer.

Tout en méditant sur la notion d'amitié, je m'avançai jusqu'au rebord du toit. Mes pieds nus en dépassaient légèrement et il n'aurait suffit que d'une pichenette pour m'envoyer m'écraser en bas, devant tous les élèves de l'internat. Rien que d'imaginer mon corps disloqué , je frissonai d'horreur. Ce pendant, je en me reculai pas et sortis plutôt mon téléphone.

[23 août 20XX, 14h14] >Aéroport<
Un homme me dit qu'il est là pour venir me chercher. Il ment. Ce qu'il veut, c'est m'enlever pour ensuite pouvoir disposer de moi puis se débarrasser de mon corps.

[23 août 20XX, 14h16] >Aéroport<
J'ai menti. Je lui ai dit qu'il se trompait de personne puisque c'est la police en personne qui devait m'escorter. Il s'est enfuit.

Cela s'était passé trois jour plus tôt, à mon arrivée dans ce pays. J'avais toujours su détecter les mensonges mais grâce à mon Mirai, je m'en sortais encore mieux. En parlant de mensonge...
J'entendais des pas dans l'escalier menant au toit. Une personne allait bientôt arriver et, comme mon journal ne prédisait rien, j'en conclus que je ne la connaissais pas. J'attendis que la porte s'ouvre et que l'inconnu me remarque pour parler sans pour autant me retourner, restant toujours devant le vide.
«Bonjour. Pourrais-je savoir qui tu es?»

«Eh bien chère demoiselle on se sent menacer?N'ayez crainte voyons je suis Atsukiyo. Le dieu du temps et l'espace,et vous qui êtes-vous?»
Un sourire moqueur s'épanouit sur mon visage. Me sentir menacée? Si ça avait été le cas, je n'aurais pas attendu pour attaquer. Lorsqu'un animal est en danger, son premier réflexe est de mordre. "Manger avant d'être manger", telle est la règle ici. Enfin bref, je ne me sentais donc nullement en situation dangereuse. Quoique j'aurais peut-être dû car, si je m'en référais à ce que disait cette voix masculine, le Dieu du temps et de l'espace, autrement dit le maître du jeu, se tenait juste derrière moi.
Je consultai mon chronographe mais rien n'y était inscrit. Donc logiquement, ce garçon ne mentait pas. Mon sourire changea, passant de moqueur à joyeux et je levai la tête, sans me retourner cependant. Le ciel était de plus en plus noir et je sentis une petite goutte me tomber sur le nez. Avec un petit rire, j'avançai un pied dans le vide.
«Moi? Je suis celle qui prendra ta place.»
Je continuai à rire, la situation étant plutôt cocasse de mon point de vue: je n'avais pas voulu parler aux autres joueurs pour le moment et voilà que je me retrouvai face à face avec le grand manitou. Enfin, face à face...

Je reposai mon pied sur le rebord du toit puis me retournai avec un grand sourire.
«Ou en tous cas, je ferai tout pour arriver à ce résultat.»
En gardant mon expression joyeuse, je trotinnai jusqu'à lui, m'éloignant ainsi du vide. Je commençai à lui tourner autour pour l'étudier sous toutes les coutures. Étrange, dans mon esprit, un dieu était forcément vêtu d'une grande cape et n'avait pas l'air d'un jeune homme...
Tout en continuant mon inspection, je me mis à parler.
«Dis donc monsieur le Dieu, sais-tu à qui je pourrais m'allier pendant le jeu?»
À nouveau, un petit rire s'échappa de ma bouche. De cette question, je connaissais la réponse. Je n'avais besoin de personne pour me dire la vérité.
Mon regard se fit glacial et je m'arrêtai devant lui en le fixant droit dans les yeux.
«À personne. Car tout le monde ment et on ne peut compter que sur soit même.» murmurai-je d'une voix tranchante et froide.
Même si mon journal ne me disait rien à propos de lui, je ne lui faisait pas confiance. D'ailleurs, je ne lui avait toujours pas dit mon nom. Mais comment ne pas se méfier devant celui qui organisait un jeu où le but était de se tuer jusqu'au dernier? Peut-être qu'auparavant, je me serais présentée sans hésiter. Seulement, j'avais appris à faire attention.

Malgré toute cette agitation interne, ma bonne humeur finit par revenir et mon visage retrouva par la même occasion un air beaucoup plus doux. Recommençant à sourire, je lui tendis la main.
«Bref. Heureuse de te rencontrer, Atsukiyo.»
Ce n'était pas un mensonge. Car après tout, qui sait, savoir qui tenait les rênnes pouvait toujours servir, qu'on fasse confiance ou non à cette personne.